Pas de bateaux de sauvetage des ONG entre la Libye et l’Italie

Des milliers de migrants risquent de mourir en mer en raison de mesures répressives contre les navires de secours des ONG, qui ont laissé la Méditerranée centrale sans navires de secours humanitaire depuis le 26 août, rapporte le Guardian.  

Il n’y a pas eu de période aussi longue pendant laquelle les navires de secours humanitaire ont été absents depuis qu’ils ont commencé leurs activités fin 2015. Suite à une nouvelle politique du gouvernement d’extrême droite en Italie interdisant aux navires de secours humanitaire l’accès aux ports du pays, les ONG qui les utilisent ont de plus en plus de mal à poursuivre leur travail. Malte a rapidement suivi l’exemple italien et fermé ses ports aux navires de secours rejeté par l’Italie.

Sans les bateaux des ONG, les eaux au large de la Libye sont surveillées par des garde-côtes libyens, qui ont conclu un accord avec l’Italie en 2017 pour ramener les personnes qui tentent d’atteindre l’Europe jusqu’à la côte nord-africaine. Cependant, une fois en Libye, les migrants sont souvent mis en détention et subissent des conditions et un traitement inhumains.

Selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), 2 383 migrants sont morts lors de naufrages en 2017, et 100 308 sont arrivés en Italie. En 2018, les bateaux des ONG subissant la pression des autorités italiennes et maltaises, le nombre des victimes a atteint plus de 1 500, et seuls 20 319 migrants ont débarqué dans le pays.

Les données de l’OIM indiquent que le nombre de victimes parmi les migrants qui traversent la Méditerranée a chuté au cours de l’année passée, mais le nombre de ces noyades comparé au nombre des arrivées en Italie a fortement augmenté au cours des derniers mois. La probabilité de mourir pendant la traversée est désormais trois fois plus élevée.

Il y a une semaine, six pêcheurs tunisiens ont été arrêtés en mer et accusés de faciliter le trafic de migrants par la police italienne après que leur chalutier ait relâché un petit bateau qu’il remorquait avec 14 migrants à bord, à 24 kilomètres de l’île italienne de Lampedusa. Les avocats des pêcheurs disent qu’ils ont vu un bateau de migrants en détresse et pris la décision de le remorquer jusqu’à ce qu’il soit en sécurité dans les eaux italiennes, a rapporté le Guardian.

« Rome a réussi à se débarrasser des yeux des ONG, qui pourraient témoigner des abus des garde-côtes libyens. Aujourd’hui, seuls les bateaux marchands et les pêcheurs restent, et certains d’entre eux continuent heureusement à répondre aux lois de la mer, au péril de leur vie », a déclaré Fulvio Vassallo, un professeur spécialisé dans le droit d’asile à l’Université de Palerme.

Entre-temps, au cours d’une réunion de ministres de l’Afrique et de l’UE à Vienne pour discuter de la migration, les ministres de l’intérieur de l’Italie et de l’Autriche ont soutenu une proposition visant à traiter les demandes d’asile des migrants sur les navires en Méditerranée.

« Pour les migrants qui réussissent à arriver dans les eaux territoriales d’un État européen et sont ensuite secourus par un navire, nous devons utiliser ces navires pour effectuer les contrôles appropriés sur la protection qu’ils méritent », a déclaré le ministre autrichien de l’intérieur, Herbert Kickl lors d’une conférence de presse suivant la réunion.

« On est bien traité à bord d’un navire » a dit Kickl, et il a ajouté que les contrôles « devraient durer quelques jours » après lesquels ceux dont les chances d’obtenir le droit d’asile en Europe sont trop bas se verraient refuser l’entrée.

« Une fois que les gens ont mis les pieds sur le continent, on ne peut les faire partir qu’avec de grandes difficultés et à un coût élevé, » a dit Kickl.

Le ministre autrichien de l’intérieur estime qu’il devrait être « impossible de demander l’asile ailleurs qu’à l’extérieur de l’UE, et que les demandes devraient être traitées en dehors de l’UE. »

TMP – 01/10/2018

Légende de la photo : Le bateau Proactiva Open Arms, que l’on voit ici sortir du port de Barcelone en juillet, est désormais ancré au port après l’interdiction des bateaux de sauvetage par l’Italie. L’ONG qui l’utilise pense qu’il ne peut pas passer de longues périodes en pleine mer, particulièrement à l’approche de l’hiver.